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Neurosciences et procrastination

Apprentissage

La procrastination est un phénomène de société qui touche une grande partie d’entre nous.

Mais, connaissons-nous vraiment son origine ?

Que se passe-t-il donc dans notre esprit quand on procrastine ? Comment notre cerveau fonctionne-t-il pour que nous soyons quasiment poussés à choisir ce report de tâches ?

Pour essayer de répondre à ces questions, je me suis tourné vers les neurosciences, pour bien comprendre ce phénomène, compléter mes connaissances sur ce sujet et surtout adapter mon accompagnement de coach scolaire et l’améliorer.

C’est quoi les neurosciences ?

Les neurosciences sont un domaine de la science qui se consacre à l’étude du système nerveux. Il étudie notamment le cerveau, la moelle épinière et leur fonctionnement. Ces domaines visent à comprendre comment les neurones (les cellules nerveuses) interagissent pour contrôler les fonctions corporelles, le comportement, la cognition, les émotions et d’autres aspects de la vie humaine.

Les neurosciences ont des applications dans de nombreux domaines, y compris la médecine, la psychologie, la neurologie, la psychiatrie, l’intelligence artificielle et la recherche en sciences cognitives. Elles contribuent à notre compréhension des troubles neurologiques, du comportement humain, de l’apprentissage, de la mémoire, de la perception, de l’émotion, et bien plus encore.

Que disent les neurosciences à propos de la procrastination ?

Les neurosciences apportent des éclairages intéressants sur le sujet en examinant les processus cérébraux associés.

Un déséquilibre ?

Deux parties du cerveau nous intéressent :

  • Le cortex préfrontal qui est la région du cerveau impliquée dans la planification et la prise de décision.
  • Le système limbique qui s’occupe de la régulation émotionnelle.

Des études suggèrent que le fait de remettre ses tâches à plus tard pourrait être lié à une faible activation du cortex préfrontal, combiné à une activation plus forte du système limbique. Cela peut conduire à une difficulté pour réguler les émotions négatives associées aux tâches à accomplir.

Il y aurait donc un déséquilibre entre le cortex préfrontal et le système limbique.

Un calcul du cerveau ?

Des chercheurs de l’Institut du Cerveau à Paris ont étudié le comportement de procrastination chez 51 participants. Ils ont utilisé l’imagerie par résonance magnétique (IRM) pour enregistrer l’activité cérébrale pendant que les participants prenaient des décisions. Ils ont découvert que le cortex cingulaire antérieur joue un rôle clé dans la décision de procrastiner. Cette région évalue les coûts (efforts) et les bénéfices (récompenses) associés à chaque option.

Calcul coût bénéfice

Une partie de notre cerveau, le cortex cingulaire antérieur effectue un calcul coût bénéfice en intégrant les différents éléments. Il évalue le temps nécessaire pour accomplir une tâche, son coût par rapport à la récompense attendue, son bénéfice.

La tendance à la procrastination peut être liée à notre cerveau qui décompte plus rapidement les coûts que les récompenses. En d’autres termes, nous sommes plus sensibles aux efforts immédiats qu’aux gains futurs. Les tâches qui sont immédiatement gratifiantes activent davantage le système de récompense que celles qui offrent des récompenses lointaines.

Exemple : votre adolescent revient de l’école et plutôt que de faire ses devoirs, il s’affale dans le canapé et croque un morceau de chocolat.

Dans cet exemple, la récompense est bien sûr le confort du canapé, le fait de ne rien faire et le chocolat. Alors que, s’il s’était mis au travail, sa récompense aurait été le fait d’avoir assimilé la matière, le bon résultat au contrôle, les félicitations des parents et des professeurs.

Ces récompenses auraient été obtenues au prix d’un effort plus ou moins important. Elles sont hypothétiques puisque rien ne garantissait le résultat du contrôle ni les félicitations. Elles sont plus éloignées du moment où votre ado rentre de l’école et donc du choix qu’il doit faire.

Votre adolescent choisi la facilité et donc la « récompense immédiate » tout en étant bien conscient des conséquences.

Distorsions temporelles

Les procrastinateurs peuvent avoir une perception altérée du temps. Ils ont parfois du mal à gérer leurs émotions à court terme notamment face à des tâches difficiles et ne cherchent pas à résoudre immédiatement leur inconfort. Cette séparation entre le moi présent et le moi futur peut influencer nos décisions et nous pousser à reporter des tâches comme nous le démontre cet article sur la douleur et la procrastination. Les distorsions temporelles jouent un rôle essentiel dans la procrastination.

Le moi présent et le moi futur : Notre cerveau est souvent divisé entre deux versions de nous-mêmes. Le moi présent est celui qui vit l’instant présent, tandis que le moi futur est celui qui planifie, anticipe et prend des décisions pour le long terme. La procrastination survient lorsque ces deux versions de nous-mêmes entrent en conflit.

Biais de l’hyperbolicité

Le fait de privilégier les récompenses immédiates plutôt que les futures a un nom : le biais de l’hyperbolicité. Par exemple, manger un gâteau maintenant est plus attrayant que de manger une salade pour des bénéfices futurs sur la santé. Les procrastinateurs ont souvent une préférence marquée pour les gratifications instantanées, même si cela signifie reporter des tâches importantes.

Émotion et inconfort

Lorsque nous sommes confrontés à une tâche désagréable ou difficile, notre cerveau peut réagir émotionnellement. Le moi présent ressent l’inconfort immédiat de la tâche. Tandis que le moi futur sait que la tâche est nécessaire pour atteindre un objectif à plus long terme.

Dysfonctionnement de l’anticipation

Les procrastinateurs ont parfois du mal à anticiper correctement le temps nécessaire pour accomplir une tâche. Ils sous-estiment le temps requis et pensent qu’ils auront plus de temps plus tard. Cela conduit à reporter la tâche jusqu’à ce qu’elle devienne urgente.

Réseau de contrôle exécutif

Le réseau de contrôle exécutif du cerveau, qui comprend le cortex préfrontal dorsolatéral, est crucial pour la régulation des fonctions cognitives telles que la planification, l’attention et l’inhibition.

Pour mieux comprendre son rôle et son lien avec la procrastination :

Fonctions du cortex préfrontal dorsolatéral 

  • Inhibition, coordination et modulation du comportement : Implique la capacité à mettre en place des réponses automatiques, à coordonner des actions complexes et à moduler notre comportement en fonction du contexte.
  • Recherche, récupération et mise à jour de l’information pertinente : Accède à des informations stockées en mémoire, de les récupérer et de les mettre à jour en temps réel.
  • Planification, préparation et anticipation : Prévoie les actions futures, prépare les tâches et les conséquences de nos choix.
  • Régulation et contrôle cognitifs et émotionnels : Gère nos émotions, maintient notre attention et résiste aux distractions.
  • Flexibilité pour changer l’attention et le comportement : Ajuste notre attention et notre comportement en fonction des changements de contexte.

Procrastination et cortex préfrontal dorsolatéral

Des changements dans ce réseau peuvent rendre difficile le fait de commencer ou maintenir une tâche, caractéristique de la procrastination. Par exemple, si le cortex préfrontal dorsolatéral ne fonctionne pas de manière optimale, il peut être plus difficile de planifier et d’organiser nos actions.

La procrastination peut résulter d’un déséquilibre entre les fonctions exécutives, comme la planification et les impulsions émotionnelles. Lorsque le cortex préfrontal dorsolatéral ne parvient pas à empêcher les impulsions immédiates, comme l’envie de se distraire, la procrastination peut s’installer.

En outre, il est un acteur clé dans notre capacité à gérer notre temps, à prendre des décisions et à maintenir notre attention. Son dysfonctionnement peut influencer notre comportement pour remettre à plus tard certaines tâches importantes.

Au final, la procrastination est un mélange complexe de facteurs cognitifs, émotionnels et comportementaux.

Stratégies pour surmonter la procrastination en prenant en compte les neurosciences

Comprendre comment notre cerveau évalue le temps et les coûts peut nous aider à mieux gérer nos tâches et à éviter la procrastination.

Auto-observation

Prenez conscience de vos habitudes de procrastination et identifiez les schémas.

Planification

Établissez des échéances réalistes et divisez les tâches en étapes plus petites.

Récompenses différées 

Associez des récompenses positives à l’achèvement de tâches importantes.

Visualisation du futur 

Imaginez les avantages à long terme de l’accomplissement de la tâche.

Il est important de noter que la procrastination est un phénomène complexe. Ces explications ne sont qu’une partie du tableau. La recherche en neurosciences continue sans cesse d’explorer ces mécanismes. Et de nouvelles découvertes peuvent fournir des informations plus détaillées sur la façon dont le cerveau contribue à la procrastination.